Infirmier auxiliaire en obstétrique
La polyvalence au service des familles
Après plus de 15 ans d’expérience au sein de nombreux services, Mathieu Giguère décide de rejoindre un service non traditionnel pour les hommes : l’obstétrique. Rencontre avec un infirmier auxiliaire d’une grande polyvalence et humanité. Il nous parle de son parcours, riche, de ses expériences, nombreuses, de son apport, important, dans un service où on apprécie sa testostérone. Il mentionne au passage son futur et celui d’une profession, sa profession, qu’il adore au point de l’enseigner. Rencontre avec un infirmier auxiliaire aux mille visages et aux mille talents.
Par Olivier Champion, Collaborateur |
Une journée type en obstétrique
Au service d’obstétrique, les journées de Mathieu varient beaucoup, c’est l’une des choses qu’il aime de son travail. Il prodigue des soins post-partum à la mère et à son nouveau-né. Il montre une foule de choses aux nouveaux parents, et notamment aux pères, à propos de l’allaitement, du changement de couche, explique comment reconnaître les signes de faim du bébé, etc. Son bagage d’enseignant lui est dans ce cas fort utile et l’aide à être un bon pédagogue. Mathieu contribue à l’évaluation lorsqu’il recueille des données cliniques pour que ses collègues infirmières puissent faire les évaluations. Cela comprend, par exemple, la prise des signes vitaux du bébé et de la mère, la mesure du fond utérin, l’observation des lochies, la prise des ponctions capillaires pour le bébé, les prises de sang à la mère, etc.
Il lui arrive également de travailler à la pouponnière où, là aussi, ses tâches sont variées (prendre les signes vitaux, aider à l’allaitement, donner le biberon lorsque les parents sont absents, donner les bains, etc.). Enfin, il arrive aussi à Mathieu d’aller en ante-partum pour assister l’infirmière lors de l’accouchement ou des césariennes d’urgence. Dans ce cas, en salle d’opération, il assume le rôle d’instrumentiste ou d’aide technique et transmet les instruments nécessaires à la césarienne, en plus de faire le compte et le décompte opératoires.
Il lui arrive aussi d’être la deuxième paire de mains pour remplir le plateau d’épidurale, ajouter du matériel et faire les vérifications nécessaires des chambres d’accouchement.
Du bloc opératoire à l’obstétrique Relever de nouveaux défis
Mathieu a quitté le bloc opératoire pour relever de nouveaux défis, mais aussi, parce que le contact avec le patient lui manquait. Au bloc, le patient est généralement endormi, ce qui limite, et c’est un euphémisme, les relations et le contact. Mathieu souhaitait les retrouver.
Pourquoi l’obstétrique? Ce service l’a toujours attiré, car il lui permet d’exploiter son sens du contact humain, et parce que comme il le dit lui même: « travailler avec les bébés et leur famille, c’est une spécialité joyeuse. On travaille avec la vie. »
Aujourd’hui encore, il demeure impressionné lorsqu’il tient un petit être de quelques heures dans ses bras. Il aime aider les parents à gérer leurs émotions et à comprendre leur nouveau rôle.
Une adaptation nécessaire
Passer du bloc opératoire à l’obstétrique a demandé une certaine adaptation. Mathieu a ainsi dû réapprendre le fonctionnement d’une unité de soins, les technologies ayant évolué au fil des années. Le défi majeur a sans doute été l’allaitement. Il a fallu à Mathieu développer ses connaissances et compétences sur les techniques d’allaitement et l’usage du tire-lait. Il ne cache pas avoir eu aussi une certaine appréhension concernant la manière dont ses nouvelles collègues allaient le percevoir. Son intégration s’est faite facilement et rapidement. Ses collègues étaient ravies de côtoyer un homme, car cela changeait positive-ment la dynamique au sein de l’équipe.
Le bloc opératoire, un passage utile et formateur
Son expérience antérieure au bloc opératoire, où il a travaillé sept ans, a considérablement aidé Mathieu, notamment pour le service interne lors-qu’il assiste un médecin pour une césarienne d’urgence par exemple. Son bagage lui permet alors de faire face à l’imprévu, de gérer son stress ou celui des autres. L’expertise accumulée au bloc opératoire, ses connaissances sur les normes en salle d’opération et sur la façon d’agir avec un médecin, l’aident à garder son sang-froid, à rester alerte et à parer à toute éventualité.
Être infirmier auxiliaire en obstétrique, ou comment vaincre les préjugés
Dans son unité, Mathieu est le seul infirmier auxiliaire et le seul homme, ce qui, reconnaît-il sans peine, surprend souvent les parents, tant il est rare de voir un homme travailler en obstétrique. Cependant, en quatre ans, il n’a jamais eu de difficultés avec les futures mamans ou nouveaux pères, peu importe leur origine culturelle. Son attitude et son approche, très humaines et très professionnelles, jouent sur le climat de confiance entre le personnel soignant et sa patiente. Il ne lui faut souvent que quelques instants pour mettre la famille à l’aise. Ainsi, s’il doit corriger une position, un geste, lors de l’allaitement par exemple, il ne touche jamais directement le sein de la mère. Il lui demande plutôt la permission de prendre sa main pour la placer correctement ou bien propose au père de lui montrer comment aider sa conjointe.
À la remarque qu’il entend le plus souvent : « Com-ment un homme peut-il montrer l’allaitement quand il ne peut allaiter », il répond simplement qu’une femme n’a jamais allaité avant son premier enfant et qu’elle ne sait donc probablement pas comment faire ! Pour Mathieu, le succès réside dans le respect, la maîtrise des techniques, et dans le fait de tenir à jour ses connaissances par de la formation continue.
(Sur la photo : l'infirmier auxiliaire, Mathieu Giguère, s'implique également dans le comité d’inspection professionnelle de l'OIIAQ.)
Accompagner les familles
Le travail de Mathieu commence vraiment avec l’accouchement. Il collabore avec l’infirmière pour installer la future maman afin que cette dernière soit à l’aise, pour pousser ou changer de position. Après l’accouchement, il identifie les tubes de prélèvement du bébé, puis, après les deux heures de post-partum, c’est généralement lui qui transfère la mère et son nouveau-né dans leur chambre pour leur séjour. Les parents changent, mais son rôle reste le même et il veille à respecter le plan de naissance. Si les parents désirent qu’il y ait le moins de personnes possible dans la chambre lors du travail, l’infirmière avise les parents qu’il se pourrait que Mathieu l’assiste lors du travail.
LE SAVIEZ-VOUS ? |
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Quelles sont les activités que l’infirmière auxiliaire peut exercer en obstétrique (soins mère-nouveau-né) ? L’infirmière auxiliaire peut exercer diverses activités professionnelles qui lui sont reconnues par la loi. Ainsi, elle peut notamment, en vertu de l’article 37 p) du Code des professions, contribuer à l’évaluation de l’état de santé d’une personne (y compris, de la mère et/ou du nouveau-né) et à la réalisation du plan de soins, prodiguer des soins et des traitements infirmiers et médicaux dans le but de maintenir la santé, de la rétablir et de prévenir la maladie. De plus, elle peut exercer auprès de la mère et du nouveau-né, l’une ou l’autre des neuf activités qui lui sont réservées à l’article 37.1 5o du Code des professions. Par conséquent, elle peut prodiguer des soins et des traitements reliés aux plaies selon une ordonnance ou selon le plan de traitement infirmier. Elle peut également administrer de l’ocytocine par voie intramusculaire, selon l’ordonnance, lorsque prescrit, pour provoquer ou stimuler les contractions de l’utérus. De plus, l’infirmière auxiliaire peut, après évaluation de l’infirmière et selon ses directives, vérifier la fermeté et la hauteur de l’utérus, procéder au massage utérin afin de favoriser la contraction de l’utérus et surveiller ou observer la coulée des lochies pendant le massage. Enfin, l’infirmière auxiliaire doit consigner au dossier toutes observations ou tous soins dispensés. Information Selon l’article 39.4 du Code des professions, l’infirmière auxiliaire peut dispenser de l’information dans la mesure où celle-ci est reliée aux activités professionnelles qu’elle peut exercer. Ainsi, elle peut dispenser de l’information relative à l’état de la mère et du nouveau-né, notamment en ce qui concerne l’allaitement du nouveau-né ou tout autre soin qu’elle prodigue à la mère et/ou au nouveau-né. À cette fin, elle utilise les outils développés par la direction des soins infirmiers. Pour en savoir davantage, veuillez consulter la réponse complète dans la Foire aux questions, sur le site de l’Ordre. |
Le concept mère-enfant… Ne pas oublier le père
Mathieu constate que le concept mère-enfant est très bien perçu par les nouveaux parents. La cohabitation est de mise, les parents partagent leur chambre avec leur nouveau-né, sauf contre-indication médicale. Ceci permet aux parents d’être à proximité de leur bébé et facilite le développement du lien affectif avec ce dernier. Pour Mathieu, le père joue un rôle essentiel dans toutes les sphères de la vie du nouveau-né. Dans sa pratique, il essaie donc de l’inclure dès qu’il en a l’occasion : lors du premier bain par exemple. Il invite le père à le faire avec lui pour qu’il prenne confiance. Il agit de la même façon pour le change-ment de couches. Son attitude est appréciée et les commentaires qu’il reçoit sont très positifs. Mathieu suggère souvent aux papas d’aider leur conjointe lors de l’allaitement, car c’est un travail d’équipe : maman allaite et papa change la couche et fait faire le rot. Il rassure aussi beaucoup les nouveaux parents afin qu’ils prennent confiance et il les aide à décoder les besoins de leur nouveau-né.
S’adapter aux nouveaux concepts de famille
Mathieu avoue n’avoir aucun problème avec le fait que les futurs parents puissent être deux femmes, deux hommes ou une mère seule. Sa pratique évolue et accompagne l’évolution de la société, comme elle s’adapte également aux avancées médicales. « Je vous fais une confidence, cela me touche énormément de voir un couple du même sexe, ou une mère seule, fonder une famille, après être allé dans des cliniques de fertilité ou avoir eu recours à un don de sperme ou d’ovule. » Pour Mathieu, chaque être humain a le droit de connaître la joie d’être parent, s’il le désire. Ses soins sont toujours adaptés et personnalisés, sans exception.
Un professionnel parmi d’autres
Les commentaires des autres professionnels concernant le travail de Mathieu sont élogieux. Ils le considèrent comme leur collègue, un professionnel, un point c’est tout. Tant les médecins, les résidents, les infirmières que les gestionnaires le considèrent très compétent. Il faut dire que Mathieu ne laisse rien au hasard, son travail est irréprochable avec les familles dont il s’occupe, ses soins sont effectués avec rigueur et sa gentillesse ainsi que sa courtoisie constituent la base de ses relations.
Un souci constant d’avancer et de s’améliorer
Mathieu reconnaît que le baccalauréat en enseignement professionnel qu’il termine lui apporte déjà beaucoup quand il doit prodiguer des conseils aux parents, orienter de nouvelles infirmières auxiliaires ou travailler en dyade avec de nouvelles infirmières. Ce diplôme va lui permettre d’enseigner aux futures infirmières auxiliaires. Son but premier est de trans-mettre sa passion pour les soins infirmiers et de faire valoir les compétences de l’infirmière auxiliaire. « Nous sommes des professionnels et notre profession est pleine d’avenir. »
L’avenir lui appartient.